[Mise à jour le 5 février 2018]
Séance de rattrapage générales ! A l’occasion du FIFO 2018, France Ô diffuse les films qui ont marqué la précédente édition du festival tahitien. Dès à présent vous pouvez (re)voir « The Opposition » et « Bons baisers de Moruroa » en replay, et cela pendant 6 jours. A ne pas manquer également la nuit de l’Océanie, ce dimanche 11 février sur la chaîne des Outre-mers avec notamment « Waiting for John » et « Zach’s Ceremony ». Analyse de tous ces documentaires ci-dessous.

[Le 17 février 2017]
Bien sûr, le FIFO s’est refermé en danses et en musiques ce 12 février 2017 (et on vous invite à écouter l’incontournable hymne du festival que vous pouvez enclencher au début de cet article). Une semaine de projections, 30.000 spectateurs environ, et cinq prix remis par le jury, et par le public. « The Opposition », de l’Australienne Hollie Fifer, remporte la plus haute distinction, dans un palmarès qui ne dit cependant pas tout des perles rencontrées dans les salles pendant la manifestation. Suite de notre immersion polynésienne…

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The Opposition (Hollie Fifer, Australie) – en replay ici du 4 au 10 février 2018

Le fracas des pelleteuses et le claquement des balles. Bienvenue en Papouasie Nouvelle-Guinée, à Port Moresby, « la terre de l’inattendu ». Une dizaine de policiers encadrent les engins de démolition et écartent les habitants de ce quartier de tôles et de bois. Tout doit être rasé pour laisser place nette aux promoteurs immobiliers. Leur projet touristique, pharaonique, promet monts et merveilles économiques à la région, mais ce serait sans ceux qui l’occupent depuis quatre générations.

Au milieu de la tension qui électrise cette scène inaugurale, une femme aimante la caméra, et sert manifestement de pivot à la représentation. C’est l’empêcheuse de détruire en rond, et c’est elle qui a emmené la réalisatrice dans cette histoire. Dame Carol Kidu est la seule députée de Papouasie Nouvelle-Guinée, troisième mandat consécutif – et sans doute le dernier. Elle est aussi la cheffe de l’opposition. Des oppositions. Pour le moment.

Joe Moses, lui, est au tribunal pendant que son village disparaît sous les assauts des bulldozers. Il vient d’obtenir l’arrêt de cette entreprise de dévastation. Un peu tard pour les premières maisons mises à terre, suffisamment tôt pour éviter à 300 personnes de dormir dehors.

The Opposition raconte ce combat, universel. David contre Goliath. Le pot de terre contre le pot de fer. Avec son lot de rebondissements, de victoires, de défaites et d’intrigues. La députée intransigeante, incorruptible sans doute aussi jusque-là, la seule qui emportait encore le suffrage de Joe Moses et qui le rejoignait dans la lutte, va prendre la tangente. Les sous-titres qui la désignent sont implacables : d’opposante au gouvernement elle devient représentante de l’entreprise australienne aux appétits gloutons, officiellement pour trouver une conciliation entre les deux parties en conflit. Elle change donc de statut, ne porte manifestement plus la même parole et modifie le bon ordonnancement des forces dans le film. Premier retournement qui déplace la focale et l’intérêt, mais la cinéaste n’ira pas creuser davantage cette trahison, tout occupée à documenter la bataille en cours pour la terre.

Ce combat, longtemps mené en solitaire par Joe Moses aidé de son avocat, prend une autre tournure grâce à Internet. Une seule vidéo postée sur YouTube et un activiste des droits de l’Homme en Angleterre lance l’alerte. Pour naviguer et maintenir son navire à flot dans les méandres du droit, il faut des preuves. Lui va se charger d’en trouver. Victoires, défaites et intrigues. Les ressorts dramatiques sont en place…

Des cerveaux mobilisés par l’intérêt supérieur de la communauté, la fougue de la jeunesse et la force de l’art pour se faire entendre… Tous les moyens pacifiques de résistance sont déployés face à ces nouveaux explorateurs qui entendent, par la loi ou par la force, coloniser ces terres qu’ils ont prétendument achetées. Un autre coup de théâtre va les aider : le gouvernement papou s’immisce dans l’affaire, en acquérant 50% des parts du projet. Tout sauf une assurance sans risque pour Joe Moses et ses compagnons d’infortune…

The Opposition - © Hollie Fifer
The Opposition – © Hollie Fifer

Diviser pour mieux régner, la méthode est vieille comme le monde et l’argent en constitue l’un des plus efficaces leviers. Si les promoteurs du projet immobilier et semeurs de discorde n’étaient jusque-là présents dans la représentation que par des projections en 3D de leur projet, des publicités ou des entrevues policées données à diverses télévisions, ils arrivent sous l’objectif de la réalisatrice à l’occasion de l’inauguration du camp provisoire de « réinstallation ». Une partie de la communauté l’a accepté contre quelques billets ; l’autre s’élève contre ce qu’elle continue à nommer « expulsion ». Le vocable fait aussi partie du conflit. A la tribune se succèdent donc le promoteur immobilier, le représentant de l’ONU sur place et Dame Carol Kidu. Tous louent la solution pacifique et le pacte « gagnant-gagnant » passé avec le diable. Les habitants soudoyés vont évidemment vite déchanter.

Les efforts collectifs devant les tribunaux suffiront tout de même à mettre en déroute la multinationale australienne devant la Cour suprême, mais la décision ne mettra pas un terme à l’évacuation. Face aux pressions policières de l’État actionnaire, Joe Moses devient empêché d’agir, sous étroite surveillance. Il vit depuis ce film en Angleterre, où il a trouvé l’asile politique.

Hollie Fifer
Hollie Fifer

The Opposition est un film de résistance, à double titre. Par sa réalisatrice d’abord, 23 ans au début du projet, 28 aujourd’hui, qui a travaillé dans des conditions difficiles, et qui s’est mis physiquement en danger pour se faire la porte-voix des sans voix. Par son récit aussi, qui héroïse ceux qui n’ont rien face à ceux qui veulent tout. Le chef de la communauté le martèle en frappant la terre avec son bâton dans un geste qui dit à la fois la détermination et la résignation : c’est avec l’intelligence (collective) qu’il faut lutter..

Avec ce documentaire, Hollie Fifer signe un film « plein », sans temps morts ou presque, et sans échappatoire pour le spectateur. L’efficacité narrative, très anglo-saxone, repose sur un sens aigu du rythme, et une construction digne d’un polar. Tout va vite, très vite, les événements se succèdent avec un redoutable efficacité et à une allure qui ne laisse guère de place pour la réflexion. En d’autres termes, on est invité à adopter le point de vue de la réalisatrice, sans réel autre choix que d’épouser le parti pris que ce documentaire ne dissimule pas.

La démarche, sans doute nécessaire eu égard au contexte des faits, se résume par cet enchaînement de plans à la fin du film. Dame Carol Kidu, face caméra, commence par expliquer qu’il est difficile d’« arrêter le progrès ». Joe Moses lui répond indirectement, filmé dans une échelle similaire : il estime qu’il existe deux sortes de loi en Papouasie Nouvelle-Guinée ; l’une pour les pauvres, l’autre pour les « puissants ». Vient alors la vue aérienne du territoire disputé : la plage sur laquelle jouaient les enfants et s’affairaient la communauté au début du film a déjà disparu sous l’action des bulldozers…

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Zach’s Ceremony (Alec Doomadgee, Australie)

Cet attachement viscéral à la terre(-mère), cette défense acharnée de ses racines et cette revendication de la singularité des indentiés sont des thèmes récurrents qui traversent nombre de films présentés cette année au FIFO, notamment Zach’s Ceremony, auréolé d’un prix spécial par le jury.

Dans ce documentaire tendu par la promesse de son titre – on s’avance vers « la cérémonie de Zach », un père filme son fils. Pendant 6 ans, de la fin de l’enfance aux troubles de l’adolescence. C’est fort de ce matériau audiovisuel riche et précieux qu’Alec Doomadgee, qui pense à ce long-métrage depuis que lui-même a vécu ce rite d’initiation à 16 ans, s’engage dans le montage de cette « autobiographie ». Et c’est ce travail sur les archives qui intrigue et intéresse dès l’ouverture du film. « Être libre, c’est ce que je veux faire. (…) Je veux être un homme, pas un petit garçon qui pense tout savoir. » Le documentaire va suivre cette volonté du jeune homme, et les virages qui vont le mener au bout de ce chemin.

La représentation s’attache donc « l’élévation » de Zach, jeune Australien d’origine aborigène qui cherche sa voie sous les yeux et la caméra de son père. La relation de deux personnages nourrit le film en même temps qu’elle interroge le spectateur sur l’artificialité de cette mise en scène et en images. Documentaire ou fiction, documentaire et autobiographie romancée… Il faut faire le pari d’y croire.

Entre le père et le fils, aussi : le soubassement des origines familiales, rappelées par une animation qui retrace l’Histoire des Aborigènes en Australie. Racisme et ostracisme. Dans une séquence saisissante, avec encore ce rapport très charnel à la terre que l’on gratte ici aussi avec un bâton, que l’on foule de ses pieds nus ou que l’on prend dans ses mains, Alec Doomadgee revient sur l’événement traumatique qui a marqué son enfance : rejeté une nuit du lit familial par son père parce qu’il n’avait « pas la bonne couleur », parce qu’« il était jaune ». Ce traumatisme se transmet sans doute aujourd’hui au fils, et Zach y est d’autant plus sensible qu’il se situe, d’une manière ou d’une autre et tout au long du film, à un carrefour de l’existence. Qui est-il ? D’où vient-il ? Où va-t-il ? Ce sont ces question qu’il lui faudra résoudre, entre un père omniprésent et une mère absente, pour se situer au monde, et sur sa terre. C’est ce passage que vient concrétiser la cérémonie vers laquelle le film s’avance.

Zach’s ceremony est un documentaire sur l’adolescence, et sur la filiation. C’est une autre sacralité manifeste dans la région, qui transpire dans plusieurs productions présentées au FIFO. Zach est un nouveau maillon de la chaîne générationnelle ; maillon essentiel car il est celui qui permet la perpétuation d’une culture. Et s’il s’écarte du chemin tracé et imaginé par son père en succombant momentanément aux sirènes de l’alcool et de la drogue, il ravalera sa fierté adolescente pour revenir mettre les pas dans ceux de ces ancêtres. Debout, intimidé et droit. Les images ont changé de facture depuis le début du film, elles sont devenues plus « professionnelles ». Perce tout de même ce nouveau poids qui repose désormais les épaules du jeune homme, sa nouvelle responsabilité : transmettre à son tour le relais.

Waiting for John (Jessica Sherry, Etats-Unis)

« Tu auras une seule amie, et cette amie, c’est l’Amérique. » Tel est en substance le crédo qui anime – et fédère – cette communauté du Vanuatu. Le culte du cargo. C’est un mythe, un espoir, une chimère peut-être. Quelque chose en tout cas qui maintient le regard haut, planté dans l’horizon. Un but. L’attente d’un cadeau tombé du ciel des Etats-Unis, qui prendrait la forme d’une abondance de biens et de nourriture. La promesse de l’opulence sans limite offerte aux initiés du culte de John Grum, un ancien soldat américain sans doute aperçu sur l’île pendant la Seconde Guerre mondiale, soude presque tous les habitants de cette petite île. Presque.

Les rites qui entourent et constituent cet attachement à ce messie imaginaire venu d’ailleurs sont nombreux à Tanna. Les plus frappants, que le film consigne dès les premiers instants de la représentation, ce sont les initiales des USA que l’on se tatoue chaque année en rouge sur la peau, ou le lever quotidien du drapeau américain, dans l’attente du jour divin.

Pour construire Waiting for John, peut-être le documentaire en compétiton le plus intéressant du FIFO (et qui ne figure pas au palmarès), la réalisatrice Jessica Sherry a misé sur le temps (très) long. Au tournage, d’abord, avec des images enregistrées à 14 ans d’intervalle. Dans le matériau filmique tiers aussi, avec des archives parfois vieilles de plus d’un siècle. Une richesse audiovisuelle qui permet de discrètement multiplier les strates discursives du récit.

Car si le film formule en creux le pouvoir d’attraction du rêve américain – un mirage que la tribu entretient paradoxalement en cultivant ses propres traditions -, il dépeint aussi très subtilement plusieurs facettes de la communauté. La représentation est ainsi régulièrement traversée par des séquences ethnographiques, s’attardant sur la cuisson du cochon ou la consommation de kava, mais aussi par des digressions plus historiques, par exemple le rôle des missionnaires à la fin du XIXème siècle, ou encore par des incursions environnementales, mentionnant ce lac qui déborde pour ensuite disparaître il y a une vingtaine d’année. Ces fils narratifs enchevêtrés densifient le documentaire, mais n’empêchent pas une progression claire et efficace du film, alimenté il est vrai par d’abondantes plages musicales, systématiques et sursignifiantes.

Jessica Sherry rythme également l’enchaînement des séquences en distillant habilement les péripéties qui affectent la communauté ; à commencer par sa division en deux groupes. Isak, fervent défenseur du culte de John Grum, et Fred, adepte de l’Unité rassemblée pour le Christ, se disputent le leadership, et les fidèles. Waiting for John devient alors un film très politique sur le pouvoir – et sa conservation. Un documentaire, aussi, qui interroge nos croyances – et donc nos doutes, comme la manière avec laquelle on peut regarder, considérer et désirer le monde. Waiting for John mène en cela le spectateur à s’interroger sur sa propre condition, et peut-être même sur le sens de son existence. Une œuvre qui, à partir d’une petite communauté isolée du Pacifique, parvient à toucher intimement ses spectateurs, où qu’ils se trouvent…

Alors on danse (Jacques Navarro-Rovira, Polynésie française)

Sans surprise, le prix du public a été décerné à Alors on danse. Sans surprise, tant les rires et les émotions étaient palpables lors des projections du film, et tant le sujet du documentaire a pu alimenter les conversations dans les allées de la Maison de la Culture. L’objet, parfois tabou : le handicap en Polynésie française, que le réalisateur et ses comparses se proposent de transcender par la danse.

« Ce n’est pas parce qu’on a un corps cassé qu’on ne peut pas être dans le beau. » C’est le leitmotiv d’une professeure de danse venue de métropole à Tahiti pour dispenser des cours à de jeunes handicapés. Le film est construit selon la chronologie de l’aventure : l’arrivée sur l’île et la découverte de ses élèves, le travail dans la salle de répétition, le départ de la formatrice et la poursuite de l’aventure jusqu’à la représentation publique du spectacle final.

C’est un sujet en or, et qui déborde parfois de bons sentiments. Le documentaire se fait l’écho d’un discours essentiel, sur et par-delà la différence. Les séquences de danse, l’enchevêtrement des corps valides et empêchés dans une chorégraphie commune sont saisissants. La caméra s’attarde sur les détails, les mains, les fauteuils… On nous donne véritablement à voir « des âmes et des cœurs qui dansent, qui osent ». Les instants d’efforts mobilisés pour dompter ces corps réfractaires, pour s’exprimer ensemble coûte que coûte dans les rires et les larmes, flirtent avec la grâce.

On regrettera cependant ce que la réalisation emprunte aux codes de la télé-réalité, ces moments dérangeants où les personnages valides, mal cadrés de surcroît, sont amenées à commenter ce qu’il vient juste de se produire dans la scène précédente. Ces maladresses gâchent le plaisir de la contemplation et nous coupent régulièrement du film. Dommage, pour un documentaire qui reste cependant un outil de transformation sociale et culturelle du regard.

Servant or slave (Steven McGregor, Australie)

Autre film absent du palmarès, mais tout de même remarquable, le documentaire de Steven McGregor est construit à partir de témoignages de femmes aborigènes, volées à leurs familles dès leurs enfances pour « bénéficier » d’une autre éducation et « apprendre à affronter le monde des Blancs ». Des histoires édifiantes, enfouies dans la mémoire collective. Le réalisateur a décidé d’illustrer ces lointains souvenirs par des scènes reconstituées. Des séquences de « docu-fiction » qui ont un double effet contraire : elles rendent présent un passé en fabriquant des images qui n’existent pas, coupant visuellement la parole aux protagonistes et donc la conversation établie entre ces personnages et le spectateur, mais elles renforcent aussi le pouvoir d’évocation de leurs récits.

Bons baisers de Moruroa (Larbi Benchiha, France)

Autre film de témoignages, qui n’a apparemment pas marqué le jury, sans doute parce que la problématique est rebattue en Polynésie, mais qui n’en demeure pas moins éloquent, et révoltant. Bons baisers de Moruroa revient sur les essais nucléaires français dans le Pacifique. Un « bombardement effectué au-dessus des atolls », 193 essais en 30 ans, dont 46 tirs atmosphériques qui ont mobilisé jusqu’à 150.000 personnes, civiles et militaires. Les témoins de l’époque, dont certains portent les stigmates de ces expérimentations sur le visage, reviennent sur ces expériences dans un film coup de poing. Certains des protagonistes du documentaire sont décédés depuis l’enregistrement…

Le film, qui alterne entrevues classiques et documents d’archives, revient sur la contamination nucléaire des airs, des Hommes et des eaux. Les précautions, à l’époque, étaient ridicules, et le discours du Général de Gaulle apparaît aujourd’hui comme scandaleusement léger. L’ensemble est édifiant, et les maladies transmises aux descendants des acteurs de l’époque est révoltante.« Vous mettez des enfants au monde, ce n’est pas pour les rendre malades… », entend-on. Le film de Larbi Benchiha prend la forme du reportage, mais sa valeur testimoniale est essentielle.

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On vous a ouvert l’appétit ? Envie de davantage de films polynésiens ? Rien de plus simple : la prochaine édition du FIFO se tiendra en février 2018 à la Maison de la Culture de Tahiti. Il y a aussi bien sur France Ô. Et vous pouvez également sustenter votre gourmandise en parcourant le catalogue des éditions Au vent des îles, riche en (très bons) récits polynésiens…

Plus loin

– Tahiti, capitale océanienne du documentaire pour le 14ème FIFO

– Polynésie française : Le secteur documentaire se structure, et il a besoin d’être soutenu

One Comment

  1. Jacques Navarro-Rovira

    Bonjour M. Cédric Mal,
    Je vous remercie d’avoir partagé votre ressenti sur mon film « Alors on Danse ».
    Ce film me tenant très à cœur, j’ai lu avec intérêt vos critiques tant positives qu’un peu moins.
    Je tiens juste à préciser mon intention sur la séquence (je suppose que l’on parle de la même) où vous voyez un recours aux codes de la télé-réalité. Je crois nécessaire de rappeler que c’est « la télé-réalité » qui emprunte au documentaire et non l’inverse, pour paraître plus « vraie ». Nous filmons « la réalité ». Cette séquence montre un debriefing du cours qui vient d’avoir lieu, ce que fait la professeur Cathie à la fin de chacun de ses cours où elle questionne chacun des protagonistes sur son ressenti (danseurs handicapés, danseurs valides et accompagnants), d’abord pour les faire « redescendre sur terre » après des moments d’intenses émotions vécues et les verbaliser, mais aussi et surtout pour lui permettre d’utiliser ce vécu pour organiser les cours suivants. Cette séquence ne parle pas que de ce qu’il vient de se passer, elle met également en lumière la prise de conscience par les accompagnants du manque d’activités de ce type dans les institutions concernées par le handicap, comme le dit cette psychomotricienne qui pourtant est dans le pur « médical ».
    Le film ne fait que dérouler l’histoire qui se passe devant nos yeux et nos caméras, en aucun cas il n’organise la réalité qu’il scrute.
    Quant au choix, au montage, d’utiliser des plans « mal cadrés », il résulte du fait que ce qu’il se passait dans certains plans était plus important que l’esthétique du plan et qu’il était bien sûr hors de question de dire « coupez! On la refait… » Çà ç’aurait été de la télé-réalité. Beaucoup de protagonistes, beaucoup de choses qui se passent simultanément, deux caméras, rarement trois, souvent une seule, il est impossible d’être parfait sur chaque plan.
    Voilà, si je réagi à votre texte, c’est que j’abhorre la télé-réalité qui nous tire tous vers le bas. Mais votre appréciation est légitime, ne serait-ce que parce que dès lors qu’un film est présenté au public, il n’appartient plus à son réalisateur quoi qu’il dise ou fasse.
    Bien à vous.

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