Tous les 5 ans en France, le mois de mai est traditionnellement celui d’un choix politique d’importance. Bien évidemment, Le Blog documentaire ne se lancera pas dans les querelles partisanes, mais notons tout de même que le temps est à l’engagement, et au partage

Cross Video Days 2012

DOC

Michael Moore ne peut plus faire du Michael Moore. C’est l’une des (nombreuses) limites de sa démarche militante – le cinéaste l’a confiée en marge du Tribeca Film Festival de New York : ses interlocuteurs refusent désormais de le rencontrer. « Ils ont peur de me parler, et je dois donc envoyer mes assistants pour mener les interviews« , explique t-il à Susan Sarandon, comme nous le rapporte – excusez du peu – le Wall Street Journal.

Dans le même dialogue avec l’actrice américaine, l’auteur de The big one ou de Fahrenheit 9/11 insiste sur l’importance des festivals pour faire connaître les films, et recommande aux jeunes réalisateurs de mettre en ligne des formats courts pour « percer », estimant d’ailleurs que les documentaires sont généralement trop longs. Susan Sarandon, de son côté, met en garde contre les reconstitutions qui inondent parfois certains films, allant jusqu’à miner leur efficacité selon elle. « Un faux mouvement, et vous compromettez l’œuvre entière », dit-elle.

L’échange entre ces deux producteurs se déguste avec une certaine délectation quand on considère ce qu’il nous est donné à voir en salles en ce (joli?) mois de mai. Des films « engagés », mais non écrasés par des auteurs omnipotents. Des œuvres qui se frottent aussi franchement, et sans artifice, au Réel.

On est là ! (de Luc Descater) et Disparaissez les ouvriers ! (de Christine Thépénier et Jean-François Priester) sont de cette trempe. Le premier suit le conflit des 24 travailleurs sans papier opposés à la direction de leur entreprise en région parisienne ; le second s’attache aux salariés d’une société du Sud de la France victimes d’une liquidation frauduleuse. Deux luttes, et deux manière de « cinématographier » les conflits sociaux. Deux entreprises voisines – et remarquables – vous seront également proposées en salles en mai : Bleu pétrole (de Nadège Trebal) et Le Chemin noir (de Abdallah Badis).

Des films engagés et engageants, nous en verrons bien sûr dans les différentes manifestations qui gravitent autour du festival de Cannes – et Le Blog documentaire en profitera pour explorer les productions documentaires indiennes. Pour les amateurs de formes plus « ramassées », c’est du côté du festival des Très courts qu’il faudra se tourner. Et pour ceux qui auront la chance d’être à Madrid début mai, la Documenta propose comme chaque année de remarquables sélections, avec notamment deux documentaires français : Spring Yes Yes Yes d’Audrey Ginestet, et surtout L’hypothèse du Mokélé-Mbembé, de Marie Voignier. On y reviendra…

Signalons enfin la sortie en DVD de la Suite normande d’Ariane Doublet, aux éditions Montparnasse. A déguster sans modération… Et puis notez que dans quelques jours Le Blog documentaire vous emmènera à bord du Ciné-camion, une création documentaire itinérante fondée sur… l’engagement, et le partage.

On est là ! – © Luc Decaster (2012).

WEBDOC

Un monde de partage : le mot, pour galvaudé qu’il soit, commence à devenir indispensable au webdoc pour exister. Partage des publics, bien sûr, avec les réseaux sociaux, nécessaires chevilles ouvrières de la communication moderne. Partage des coûts aussi, avec la récurrente et obsédante question du modèle économique, que certains n’attendent pas de voir éclore pour se lancer. Le Blog documentaire fera d’ailleurs très prochainement un tour d’horizon des projets webdocs qui fleurissent sur les plateformes dites de crowdfunding : KissKissBankBank, Touscoprod ou Ulule attirent de plus en plus ces formats voués le plus souvent à exister – du moins au début – dans une économie restreinte.

L’un de ces projets, L’autre élection, tente ce mois-ci de finaliser son financement : parce que nous aimons le projet, Le Blog documentaire a décidé de le soutenir, notamment en donnant très bientôt la parole à Igal Kohen, son réalisateur et producteur.

Partager les expériences aussi, car c’est là que le documentaire puise partie de son essence. Travailler avec un sujet davantage que sur un sujet, c’est former un lien social, échanger les idées et faire avancer la connaissance. Dans le domaine de la critique par exemple, personne ne surplombe le débat d’un savoir préexistant. Les échanges qui ont eu lieu le mois dernier en marge de nos critiques de webdocumentaires vont dans ce sens. Car le webdocumentaire, comme le documentaire, suppose aussi un partage des regards et des points de vue. Le travail critique, essentiel quand il n’est pas gratuit, quand il est argumenté, pensé et soupesé, est toujours nécessaire à l’éclosion de nouvelles formes, de nouvelles manières de faire, et donc de penser.

Comme promis le mois dernier, David Carzon, le directeur du pôle web d’ARTE France, parlera également sur Le Blog documentaire de la vision éditoriale de la chaine, locomotive tricolore en matière de création web (documentaire comme fiction). Nous prendrons aussi des nouvelles de Narrative et des projets que la société développe actuellement.

Pas de répit non plus du côté de nos désormais régulières « webdocu actus », chroniques des œuvres qui sortent chaque mois : sur le gril sous les ponts du mois de mai, on retrouve notamment le Stigmatisés de Marianne Rigaux, lancé le 30 avril…

Bonnes lectures à tous !

Cédric Mal
Nicolas Bole 

No Comments

  1. C’est en tout cas un beau mois de mai qui s’annonce avec des articles de cette trempe. Merci pour toutes ces découvertes !

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