Nouvelle projection organisée par Documentaire sur grand écran et accompagnée par Le Blog documentaire. « La Chine est encore loin« , réalisé en 2008 par Malek Bensmaïl, sera proposé ce lundi 28 janvier 2013 à 20h30 au MK2 Quai de Loire, à Paris. La séance sera suivi d’un débat animé par Charles Tesson.

Présentation du film ici avec la note d’intention du réalisateur. Et comme d’habitude, nous vous offrons 10 places gratuites pour cette soirée. Tirage au sort dimanche soir… Pour participer, une seule adresse : leblogdocumentaire@gmail.com. 

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Synopsis

Le 1er novembre 1954, près de Ghassira, un petit village perdu dans les Aurès, un couple d’instituteurs français et un caïd algérien sont les premières victimes civiles d’une guerre de sept ans qui mènera à l’indépendance de l’Algérie.

Plus de cinquante ans après, Malek Bensmaïl revient dans ce village chaoui, devenu « le berceau de la révolution algérienne », pour y filmer, au fil des saisons, ses habitants, son école et ses enfants.

Entre présent et mémoire, c’est une réalité algérienne émouvante et complexe, sans fard ni masque, foisonnante et contradictoire, qui se dévoile.

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Note d’intention

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Le désir d’un film surgit souvent à partir des autres  films réalisés et d’une suite de questions qui restent  posées, suspendues.

Après mon documentaire « Aliénations » où j’ai été confronté à l’univers de la folie – documentaire où d’ailleurs la question de l’identité et de la langue est  prédominante, j’ai commencé à imaginer en premier lieu un projet sur la langue, comme enjeu de pouvoir et  d’acculturation en Algérie, de la colonisation à nos jours.

La langue ! voilà le mot. La problématique de la  langue en Algérie est bien visible dans l’ensemble de mes  films. De tout temps, elle a été l’instrument et l’objet de  controverses politiques. Toute première question de départ du projet : comment les politiques linguistiques  (matières enseignées) à travers l’école s’en saisissent  pour en faire un enjeu de pouvoir ?

Mais voilà, cela ne doit pas être l’enjeu du film.  Près d’un demi-siècle après l’indépendance, l’Algérie est vraiment loin d’avoir résolu la question lancinante de son  identité : guerre des langues bien sûr, mais aussi  effondrement des idéologies, écroulement des mythes du  socialisme et du nationalisme arabe, conformisme  islamo-nationaliste, esprit de revanche sur la  francophonie, déni des réalités historiques et culturelles.  L’Algérie post-indépendante, dans la continuité de l’aliénation et de l’acculturation du peuple a renforcé  (inconsciemment ?) une autre domination sous couvert de réintégration d’une « identité arabo-musulmane ».

Il s’agit là d’éléments de réflexion et de recherche du sujet du film, lisibles, visibles, transparents. Oui, mais comment raconter cette histoire-là, au présent ?

Lors du tournage de mon dernier film « Le Grand Jeu » – sur la  dernière campagne présidentielle en Algérie, je me suis  rendu dans beaucoup de villages à travers l’ensemble du pays. Plus de 40.000 km, de l’Est à l’Ouest, du Nord au  Sud. J’ai vu un monde rural difficile et dur, j’y ai  rencontré un nombre impressionnant d’enfants d’agriculteurs  et d’ouvriers… Des enfants aux visages tendus par le désir d’apprendre, le désir de rencontres, visages tantôt inquiets, souvent drôles, rieurs, parfois graves. Face à ma caméra, ils m’ont dit avec leurs mots (en algérien, langue de la rue et du quotidien), le manque de moyens, le manque d’écoles, d’instituteurs, de fournitures, la difficulté  aussi de se rendre à l’école, le désir d’arrêter l’école pour faire du business ou leur désir de fuir le pays…

Je décide alors que « L’enfance », l’apprentissage, et la vie de ce village seraient probablement les thèmes forts de mon prochain film documentaire. Mon pays, c’est un monde d’hommes. Il n’y a  pas d’enfance à proprement parler, il y a juste une première vie. Je n’ai pas détesté être enfant en Algérie,  mais l’enfance est écrasée par le dur monde des hommes.

Dans mon questionnement obsessionnel sur la complexité de  ma société et après l’ensemble de mes films, notamment « Des vacances malgré tout« , « Algérie(s)« , « Aliénations » et « Le Grand jeu« , la question de l’après-guerre(s) – la guerre d’Algérie et la décennie du terrorisme – reste pour moi une des préoccupations majeures dans l’accompagnement de notre  mémoire audiovisuelle contemporaine. « Notre » mémoire commune qui regroupe, indéniablement, celle des deux rives de la Méditerranée et plus particulièrement l’Algérie et la France, par l’histoire profonde qui les relient.

Puis il y a « LE » premier souvenir de cinéma. Le  souvenir de la première image de cinéma qui a  fasciné l’enfant que j’étais à Constantine. Avec mon  grand frère, nous avons admiré à la Cinémathèque un des chefs d’œuvre du cinéma néo-réaliste italien :  « Le voleur de bicyclette » de Vittorio De Sica.  Probablement un déclencheur indélébile dont je garde encore l’image de ce père et ce fils, tout autant que les espaces qu’ils traversent ensemble dans le film.

Cette image latente et récurrente qui me revient sans cesse devient, pour moi, une sorte de constat évident de ce thème fortement représentatif de l’après-guerre en Italie que je transpose à «mon » Algérie d’aujourd’hui.  L’enfant n’est-il pas l’interrogateur idéal et obsédant de  notre époque ? Histoire, crise d’identité, guerre d’Algérie, terrorisme, décennie noire, crise économique et  sociale…

Une année de tournage, 4 saisons filmées, 8 mois de montage. Tournage en HD et super 16mm, un film de 2 heures kinescopé en 35mm.

 Malek Bensmaïl

chine encore loin

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