[Le 4 janvier 2017]
Le film d’Alice Diop sera disponible sur la site de Télérama (voir ici) du 4 janvier au 8 février 2017.[Le 9 septembre 2016]
Cela fait quelques années que vous suivons avec intérêt le très réussi festival Silhouette, qui se tient chaque été à Paris… et cette année Le Blog documentaire a été chargé de remettre un prix à l’un des 9 films documentaires de la compétition. C’est donc avec un plaisir certain qu’un jury composé de Marie Baget, Fanny Belvisi, Benjamin Chevalier et Cédric Mal s’est réuni en fin de semaine dernière. Des discussions passionnées qui se sont accordées sur une évidence… L’évidence de la grâce.
C’est donc le nouveau film d’Alice Diop (lire notre entretien ici) qui a mis tout le monde d’accord. Vers la tendresse propose une exploration sensible du sentiment amoureux en « banlieue », « une errance avec une bande de jeunes de cité », « la découverte d’un univers où les corps féminins ne sont plus que des silhouettes fantomatiques et virtuelles ».
Pour construire son projet, la réalisatrice a recueilli quatre témoignages de jeunes hommes à Montreuil, quatre rencontres à ce point « bouleversantes » qu’elle a décidé de transformer ce qu’elle pensait être une enquête pour réaliser un film de fiction en court-métrage documentaire.
Selon les mots de la cinéaste recueillis par TV5 Monde, Vers la tendresse relève d’une « mise en scène de voix-off », qui interroge aussi bien la représentation de la masculinité au cinéma que le régime de croyance du spectateur (les personnes filmées ne sont pas forcément celles qui parlent). En s’aventurant avec tact sur le terrain de l’intime, Alice Diop tutoie également des problématiques plus universelles ayant trait à la place que l’on occupe dans la société. Qu’est-ce que la normalité ? La marginalité ? Quel poids de l’éducation dans notre rapport au monde, et aux autres ? Vers la tendresse embrasse tout cela à la fois, et bien plus encore, grâce à un subtil travail narratif et figuratif sur ces ces voix que l’on entend si peu, et que la réalisatrice a brillamment réussi à mettre en images.
« Avec une infime délicatesse, avec une élégance rare mêlée à la force de paroles crues et violentes, le film d’Alice Diop nous conduit « Vers la tendresse ». Ce documentaire, né d’un atelier sur l’amour mené par la réalisatrice et dont elle a enregistré les témoignages, parvient à faire entendre pleinement la dureté, la difficulté des relations amoureuses chez des jeunes ayant grandi dans les banlieues. L’habile réalisation des images, parfaitement montées avec les conversations recueillies, donne corps à une histoire aussi brute que poétique. » Fanny Belvisi
« Ce sont des voix, tantôt résignées, tantôt nerveuses, souvent endolories, posées sur des visages jeunes et anonymes, qui nous racontent la douleur d’aimer dans une France contemporaine traversée par la violence des carcans et des tabous. L’intimité inouïe des témoignages recueillis, et l’intelligence du dispositif de mise en scène par lequel il nous sont transmis, font de « Vers la tendresse » un film qui marque. Et d’Alice Diop une cinéaste qui, d’oeuvres en oeuvres, s’affirme toujours davantage comme une figure incontournable du cinéma documentaire hexagonal. » Benjamin Chevallier
« Des paroles brutes, percutantes et choquantes mais aussi tendres et émouvantes : Alice Diop recueille ici les mots tels des trésors qui donnent à penser, éclairent et désarçonnent. La réalisatrice n’est pas présente à l’image, et à peine au son, mais on perçoit très bien son écoute bienveillante. La narration suit une trajectoire de l’ombre à la lumière, de l’interdit d’aimer vers une tendresse possible puisque le film se termine sur un jeune couple amoureux et complice. » Marie Baget
La sélection était composée de :
The rock (Hamid Jafari)
Autoproduction – Iran | 2014 | 25’
Une femme, tel Sisyphe, brise des rochers dans le désert iranien.
Garde à vous (Edoardo de Ruggiero)
Terkane Formations – France | 2015 | 4’
« Dans ce film, je parlerai des morts, les vivants ça ne m’intéresse pas en ce moment ». Une rencontre inattendue entre un photographe et une statue sur la Côte d’Azur. »
Ma vie me manque (Gabriel Buret)
La Huit Production – France | 2013 | 46’
Gabriel Buret s’immisce dans la maison de campagne de ses parents afin de découvrir lequel des deux a écrit « ma vie me manque » en tout petit sur une étagère.
Les corps interdits (Jérémie Reichenbach)
Autoproduction – France | 2016 | 11’20
Plusieurs réfugiés, arrivés à Calais au péril de leur vie, dénoncent la violence de la condition qui leur est imposée. Leurs voix se superposent à des images de la « jungle » et de l’architecture carcérale du nouveau camp construit par l’État français.
Chiens des champs (Rachel Vulliens)
Vue sur Mer Films – Suisse | 2016 | 44’
Deux petits garçons jouent à la ferme. Ils grimpent aux arbres, font des pâtisseries, découvrent des ossements. La Nature devient leur temple.
Ojo Salvaje (Nicolas Paco)
Autoproduction – Espagne | 2015 | 15’
En 1991, un homme achète son premier caméscope et enregistre des moments de vie, à la fois banals et tragiques.
Les chemins arides (Arnaud Khayadjanian)
Brésil | 2016 | 37’30
Arnaud Khayadjanian entame un périple en Turquie sur la terre de ses ancêtres rescapés du génocide arménien et découvre la situation méconnue des Justes.
Vers la tendresse (Alice Diop)
Les Films du Worso – France | 2015 | 40‘
C’est une errance avec une bande de jeunes d’une cité de banlieue, une exploration intime du territoire masculin, la découverte d’un univers où les corps féminins ne sont plus que des silhouettes fantomatiques et virtuelles.
Long story short (Natalie Bookchin)
Mass produced media – Etats-Unis | 2016 | 45‘
En Californie, le montage polyphonique d’entretiens individuels fait peu à peu émerger une voix collective. La pauvreté, d’abord expérience personnelle, finit par apparaître comme une condition sociale produite par l’économie néolibérale.
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– Alice Diop : Les questions politiques par le biais de la sensibilité et de l’empathie