Le Blog documentaire fête à sa manière l’anniversaire de la mort de Bonnie Parker et Clyde Barrow. Le 23 mai 1934, les deux criminels étaient abattus par la police en Louisiane… 79 ans après, deux réalisateurs partent sur leurs traces. Olivier Lambert et Thomas Salva entament un projet transmédia autour du couple mythique, avec un documentaire, un webdoc et un jeu mobile. Carnet d’écriture de cette aventure naissante, épisode 1.
C. M.
Plus que quelques heures, minutes avant le départ pour les Etats-Unis. Direction Dallas, Texas.
Existe-t-il un autre Dallas ? Oui, même 3. En Oregon, Géorgie et Caroline du Nord.
Dallas, son univers impitoyable et son lot de clichés.
Devant nous, 3 semaines de repérage-tournage pour Chasing Bonnie & Clyde. Un projet documentaire transmédia né, comme souvent, par hasard.
Ce devait être un jour de printemps 2011. Sans occasion particulière, juste une pensée en passant.
« Tiens le FBI vient de déclassifier le dossier de « l’affaire Bonnie and Clyde », ce serait canon de faire un docu sur eux, ils sont tellement mythiques. »
L’info est là. Reste à la creuser…
Eté 2011. Montage et finition de la version documentaire 52 minutes de la série Brèves de trottoirs (film visible en ligne sur demande ici). Mais aussi, tournage-montage-préparation de La Nuit Oubliée – 17 octobre 1961.
Beaucoup de boulot, beaucoup de réflexions aussi. Nous faisons toujours en sorte d’avoir plusieurs projets en même temps. Et surtout d’en avoir un pour « l’après ». Nous y trouvons un moyen de lutter contre l’angoisse de la page blanche. Les gribouillages font toujours plus ou moins sens.
Pour les Brèves comme pour La Nuit Oubliée, nous avions avancé de la même façon : une idée, une envie, du cœur, de l’énergie, des demandes de subventions (aide à l’écriture et au développement Nouveaux Médias au CNC ; Fonds de soutien à la création MotionMaker Dailymotion ; Bourse brouillon d’un rêve SCAM ; et d’autres à découvrir ici), l’activation d’une communauté, puis la mise en route du projet en totale indépendance jusqu’à sa finalisation.
Impossible pour autant d’assumer et d’endosser tous les rôles. Nous nous étions alors reposés sur des structures dont le métier est la production pour aboutir chaque projet (Darjeeling puis Hans Lucas).
L’été 2011 marque un tournant. Le statut d’auteur-réalisateur-monteur-community manager-créateur-préproducteur nous gonfle. Nous voulons plus, pour mieux maitriser la chaîne. En tête, nos objectifs sont très similaires à ceux exposés par Igal Kohen de Piw! dans son carnet de route #1 sur le documentaire web L’Autre Election :
« Entre temps, je me suis associé pour créer Piw!, une structure de production qui nous permet de gagner notre vie et d’initier des projets audiovisuels et documentaires »
Passées les difficultés de gestion et d’administration – absolument rien de passionnant, souvent très contraignant et incompréhensible, au bout du compte épuisant – Doc Side Stories voit le jour en janvier 2012. Ce « laboratoire de création audiovisuel » nous positionne en tant que prestataire photos/vidéos pour les institutions et fondations et nous permet de dégager temps et argent pour développer un ou des projets journalistiques et documentaires.
Un an et demi plus tard, l’opération peut être considérée comme réussie. Du moins la mission est accomplie. Nous sommes salariés de notre structure, nous pouvons « voir les prochains mois venir » tranquillement. Nous avons vécu une année 2012 très remplie et le plus important : nous sommes heureux.
Ok, on ne va pas se voiler la face : être entrepreneur, cela peut être dur moralement. Être son propre patron, cela nécessite sérieux, rigueur, abnégation, parfois déception et stress lorsque les affaires ne vont pas aussi bien/vite que l’on souhaiterait. S’improviser « producteur » n’est pas une mince affaire et nous avons encore beaucoup à apprendre.
Être entrepreneur, c’est aussi vivre des mésaventures qui vous condamnent à modifier le nom de votre entreprise, alors qu’il est incroyablement complexe d’en trouver un.
Doc Side Stories est désormais Lumento. Espérons pour le meilleur et pour le pire…
Past is prologue
« Tiens le FBI vient de déclassifier le dossier de « l’affaire Bonnie and Clyde », ce serait canon de faire un docu sur eux, ils sont tellement mythiques. »
Bonnie Parker et Clyde Barrow. Couple de gangsters américains, ayant sévi pendant la Grande Dépression (1930-1934) dans les états du MidWest, et principalement le Texas. A leur actif : douze à seize meurtres, des dizaines de braquages, kidnappings et vols.Tués le 23 mai 1934 sur une route de Louisiane, au terme de deux années de course-poursuite avec le futur FBI.
Dès l’automne 2011, nous avons entamé des recherches sur le sujet. La sérendipité jouant son rôle à plein, nous avons sauté de lien en lien, de référence en référence. A n’en plus finir.
L’histoire de Bonnie et Clyde est mythique. Elle est celle d’une histoire d’amour, d’enfances croisées dans le quartier pauvre de Dallas, de la petite délinquance. Elle est celle de la construction des Etats-Unis, d’une Grande Dépression sans précédent, de ses effets dévastateurs sur la société dans une région désolée. Elle est celle de la fédéralisation des forces de police et de la création du FBI, du renouvellement des méthodes d’investigation, du désir d’Edgar Hoover d’être tout-puissant. Elle est aussi celle de l’essor de la presse sensationnaliste, des progrès de l’industrie automobile du développement des modes vestimentaires, de la photographie ou du star-system.
Adaptations au cinéma (Arthur Penn en 1967 avec Faye Dunaway et Warren Beatty), en musique (Gainsbourg et Bardot en 1968 ; Jay-Z et Beyonce en 2002), en comédies musicales aux Etats-Unis, en Russie ou au Japon, dans la presse avec des « Bonnie et Clyde modernes ».
Pourquoi ce couple suscite-t-il autant de passion? Que réveille en nous cette histoire ?
Étrangement, même si nous renvoyons souvent une image « nostalgique », le présent nous intéresse plus que le passé. Pour Bonnie et Clyde, cette logique vaut aussi.
Pourquoi, aujourd’hui, ce sujet nous intéresse ?
Rapidement, nous avons établi un parallèle intrigant : ils ont sévi pendant la Grande Dépression, première crise financière mondiale. Nous vivons actuellement la Grand Récession, la pire crise financière mondiale depuis… la Grande Dépression.
Dans les récits évoquant le parcours des amoureux criminels, leurs motivations se résument souvent à cette période précise de l’histoire. Dans une époque où les Américains avaient le sentiment « d’être volés par les banques », Bonnie Parker et Clyde Barrow ont fait le choix d’une « liberté » en volant les banques. Œil pour œil, dent pour dent.
Sans juger ce choix, ce sont ces questions qui nous sont apparues les plus intéressantes : que peut nous apprendre sur notre époque actuelle à partir de cette histoire des années 30 ? Que peut déclencher une crise économique ? Comment bascule-t-on dans l’illégalité ? Comment y survit-on ?
Bonnie and Clyde est un sujet bien présent. Chaque jour, sur Twitter, des dizaines d’adolescents en appellent à leur Bonnie ou à leur Clyde avec qui ils veulent vivre un amour intense. Aux Etats-Unis, de nombreux événements sont organisés en mémoire du couple. Moins pour glorifier leur histoire que pour célébrer ce moment d’histoire des Etats-Unis.
Parmi ces festivals, celui de Gibsland en Louisiane a retenu notre attention. Autour du 23 mai, date anniversaire de la mort de Bonnie Parker et Clyde Barrow en 1934, deux jours sont dédiés à des reconstitutions, lectures, projections et autres concours de sosies. Pendant deux jours, la ville replonge dans les années 30 et tous les passionnés de l’ère des Public Enemies se rassemblent pour ce moment de partage et de mémoire.
A nos yeux, le sujet « Bonnie and Clyde » concentrait beaucoup de choses intéressantes. Une matière à penser, questionner, désacraliser, mais surtout une matière à mettre en sons et images, à ordonnancer, à raconter.
Gibsland en Louisiane serait notre première destination en mai 2013.
Là où la vie de Bonnie et Clyde s’est arrêtée, commencerait notre aventure documentaire…
Olivier Lambert & Thomas Salva
*
A suivre sur Facebook, Twitter, et sur Le Blog documentaire…
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Bon, tout y est… plus qu’à suivre vos pérégrinations ! 😉
de la coolitude d’assassins… encore tant de naïveté en 2013…
« on se souviendra
de ceux qui commettent un crime
un jour
de tous ces chasseurs de primes
et puis
d´oublier la vie
d´un homme extraordinaire »
Les Innocents
Bonjour Matt, ce nouveau carnet de route va peut-être vous aiguiller sur nos intentions de réalisation et nos envies d’éviter la naïveté et de prendre à contrepied la « coolitude des assassins » dont vous faites mentions.
Bonne lecture en tous cas et merci pour votre retour.
http://cinemadocumentaire.wordpress.com/2013/07/17/webdocumentaire-chasing-bonnie-clyde-carnet-de-route-2/
Peut-on m’expliquer pourquoi mon avis sur ce film été effacé? Ne faut-il poster que des avis positifs sur votre blog?
Il n’a pas été effacé.
Il n’avait simplement pas encore été « validé ».
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