C’est la rentrée, et pour marquer le coup, Le Blog documentaire est allé à la rencontre des acteurs majeurs du webdocumentaire en France. Il s’agit d’interroger leurs impressions sur l’année qui se profile ; l’avenir et les développements autour du genre, mais aussi les projets mis en production…

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Premier entretien avec Boris Razon, actuellement en charge du développement des webdocumentaires au sein du pôle numérique de France Télévisions. Il est fraîchement arrivé en juillet dernier, en provenance du Monde.fr où il dirigeait l’actif service dédié aux récits multimédia. Nous lui avons donc aussi posé une question sur l’avenir de La Zone, le webdocumentaire de Bruno Masi et Guillaume Herbault, qu’il a produit avec Le Monde, et qui a récemment obtenu le prix RFI/France 24 du webdocumentaire au Festival Visa pour l’Image de Perpignan.

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Le Blog documentaire : Quels sont les projets de webdocumentaires pour l’année qui vient au sein de France Télévisions ?

Boris Razon : Nous avons une politique ambitieuse en matière de webdocumentaires, à la fois en termes de narration et de participation d’audience. Nous avons reçu beaucoup de projets et certains sont en gestation. Nous avons envie de proposer une lecture contemporaine et riche de la société. La diversité des médias utilisés dans le webdocumentaire permet d’alimenter cette richesse.

Nous pourrons développer aussi bien des unitaires que des univers, en fonction des projets. Je préfère d’ailleurs parler d’univers que de collections, même si le projet sur lequel nous travaillons actuellement constitue une collection sur la photographie documentaire. Ce projet a pour objectif de raconter l’histoire d’aujourd’hui, en France et dans le monde, par le biais des photos du réel. Il sera composé d’une trentaine de modules multimédia d’une durée de 3 minutes 30 à 7 minutes et devrait être lancé en février 2012 environ.


Comment voyez-vous l’avenir du webdocumentaire ? Qu’est-ce qui vous enthousiasme ?

Je suis heureux qu’il n’existe pas encore de formes établies mais uniquement des formes en construction qui permettent de raconter différemment le réel et des histoires. L’évolution des technologies fait évoluer les narrations. Il est difficile de dire à quoi le webdocumentaire va ressembler dans l’avenir.

Personnellement, je cherche des projets qui ne ressemblent à rien de ce que je connais déjà. Des projets qui me surprennent. Le webdocumentaire en France s’est développé par le travail d’une poignée de producteurs, de réalisateurs et d’auteurs qui ont pris en charge ce nouveau langage. Je suis certain que nous allons voir des propositions formidables car il est possible de faire des webdocumentaires qui ont la force de grands documentaires : emmener l’internaute dans une histoire en même temps qu’apporter des informations.

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Craignez-vous l’industrialisation du webdocumentaire avec la mise en place de logiciels ad hoc d’aide à la création ?

Un format standard industriel est une bonne chose car il permettra la démocratisation du langage propre au webdocumentaire et verra les coûts de production s’abaisser. Cela dit, l’économie pour ce type de programmes reste encore à trouver. A France Télévisions, nous serons davantage dans l’expérimentation des formats avec une ambition narrative et citoyenne par rapport aux sujets traités.

Le projet sur la photographie, qui verra le jour l’an prochain, est conçu de manière linéaire, à mi-chemin entre le son et la photographie. L’intérêt est de mettre en évidence l’espace interstitiel entre les photos, où réside le sens, et dans lequel le son porte l’histoire. Nous sommes dans notre objectif de service public en proposant ainsi un lieu d’expression important aux photographes et aux réalisateurs/photographes.

Un mot sur « La Zone ». Le webdocumentaire sur les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl a obtenu un prix au festival Visa pour l’Image de Perpignan : comment la carrière de cet objet va-t-elle se poursuivre après ce prix ?

Le projet est arrivé sur mon bureau alors qu’il était déjà en production avec AGAT Films. Nous avons apporté notre savoir-faire éditorial et graphique. Il s’agit d’une aventure collective où chacun a apporté sa pierre. Les modules multimédia ont été créés après la rencontre entre tous les acteurs du projet, et après de longues discussions.

Le webdocumentaire s’est ensuite développé sur Lemonde.fr, où, jusqu’en juin dernier – date à laquelle j’ai quitté la structure – nous en étions à 200.000 visiteurs, ce qui constitue un très bon résultat. Aujourd’hui, le webdocumentaire est sélectionné à l’IDFA qui se tiendra à Amsterdam. Il va donc poursuivre sa carrière en anglais puisqu’il a été traduit. Le budget global du projet est d’environ 135 000 euros.

Propos recueillis par Nicolas Bole