Second volet de cette nouvelle plongée dans les coulisses de la production d’un webdoc. Le Blog documentaire suit les étapes du développement de « No es una crisis. Madrid, la rigueur et la révolte », réalisé par Fabien Benoît et Julien Malassigné. Après un premier épisode dans lequel le projet passait de la logique de l’écrit à celle de l’écran avec l’apport du graphiste et du développeur web, voici une nouvelle marche franchie avec une forme qui change, de nouvelles questions éditoriales et techniques qui germent, et un webdocumentaire désormais sur les rails de la production pour une sortie prévue en septembre…
Dans les coulisses d’un web-développement (2/2)
Le Blog documentaire : Où en êtes-vous sur la production de « No es una crisis » ?
Fabien Benoît : Nous venons d’obtenir l’aide à la production du CNC pour un montant de 30.000 euros, après une aide à l’écriture de 14.000 euros. Le budget global avoisinera les 100.000 euros, en comptant les apports en industrie de Dailymotion qui héberge nos contenus vidéo, une aide de la Fondation Un Monde par Tous (sous l’égide de la Fondation de France), la campagne de crowdfunding que nous avons menée ou encore les apports (assez symboliques) de Médiapart et Courrier International. Ces deux derniers partenaires sont avant tout des relais presse qui permettent une plus grande visibilité du webdoc. Nous aspirons aussi à réaliser une version unitaire, pour laquelle nous discutons avec Arte et la TSR, mais nous devons d’abord faire nos preuves, d’une certaine manière, sur le webdoc.
Le webdocumentaire sera aussi présenté en avant-première à la Gaité Lyrique le 3 octobre dans le cadre de la semaine du transmédia, ainsi qu’en Espagne. Nous voulons présenter la navigation, et aussi revenir sur l’expérience d’une production indépendante qui a réussi à mener à bien le projet sans l’appui d’une grande chaîne – et nous avons pu payer notre travail.
Quelles ont été les étapes déterminantes de la production après les premiers « zonings » que vous évoquiez ici même en juin ?
Le zoning nous a permis de fixer notre pensée quant à l’architecture du webdocumentaire. Auparavant, celle-ci était une abstraction pour nous. C’était une première étape concrète. Depuis le zoning, nous avons assez largement modifié la présentation du webdoc. Nous sommes passés d’une logique de 2 grands panneaux, qui grosso modo décrivaient un quartier tourné vers la rigueur et un autre orienté vers la révolte, à un découpage de la ville en 5 quartiers. Le zoning nous a incités à réfléchir sur le nombre de pages du projet. Les échanges avec Romain Babilon et Bertrand Tronsson, le directeur artistique et le développeur, étaient intéressants : nous avons pu parler de la forme mais aussi du fond, les idées se sont confrontées. Ils ont tous les deux travaillé pour le compte d’Upian avant de monter leur structure, Tonnerre Total. Ils nous apportaient des informations susceptibles de nous faire évoluer. Par exemple, les modules de compléments, sur tel webdoc, étaient vus par seulement 3% des internautes ; il n’était donc peut-être pas utile de dépenser de l’énergie pour les réaliser. C’était un réglage fin avec beaucoup d’allers et retours entre nous.
Une fois que nous avons été convaincus par la forme et le graphisme, nous sommes passés à l’étape de maquettage du site. D’abord la page d’accueil, puis rapidement les autres pages. Nous avons eu beaucoup d’échanges autour du logo aussi, parce que cela fait partie de l’identité du webdoc. Le directeur artistique (DA) était en pointe durant cette partie-là et le webdesigner plus en retrait. Il vérifiait simplement que ce que le DA mettait en place était faisable d’un point de vue technique. Tout cela s’est déroulé relativement facilement, dans une bonne entente intellectuelle.
Vous avez réalisé les maquettes en vue de les intégrer dans le dossier de production ?
Oui, nous avons réalisé le maquettage juste avant le dépôt du dossier d’aide à la production au CNC. Au final, les visuels présents dans le dossier ne sont pas ceux que l’on a retenus car nous les avons encore retouchés par la suite.
Le temps a permis d’infuser ces réflexions, d’effectuer des réglages fins, sur le graphisme des boutons, sur les bâtiments dessinés de Madrid que l’on trouvait trop petits, sur des changements de couleurs… Des détails qui nous ont occupés jusqu’au début de l’été.
Les changements réalisés étaient d’ordre éditorial ou d’ordre technique ?
Ce sont des décisions éditoriales. En tout cas de l’ordre de la navigation. Il n’y avait pas problèmes techniques sur la première solution, mais nous nous sommes aperçus que les pages seraient un petit peu trop foisonnantes si nous n’en avions que deux. C’est notre expérience d’internaute sur le confort de navigation qui a joué. Nous avons aussi abandonné le fait de reconstituer Madrid sur un seul panneau. Nous avons opté pour 5 panneaux qui permettent de mettre en valeur les dessins réalisés.
Diriez-vous que l’apport du graphiste et du développeur est arrivé au bon moment ou qu’il aurait pu arriver plus tôt ?
Le timing était bon dans l’ensemble. Je ne suis pas sûr qu’il aurait été utile qu’ils interviennent avant. Nous avions d’abord à définir la ligne éditoriale du webdoc. Il nous a fallu un an pour en être convaincus et 6 mois de plus pour être convaincus de la façon de le présenter.
Le graphiste et le développeur n’ont pas le même regard que les auteurs sur le projet, ils amènent des éléments techniques, notamment sur la navigation. Cela produit des éléments que nous n’avions pas. Par exemple, nous nous sommes rendus compte que le panneau sur lequel les personnages étaient représentés ne fonctionnait pas. Nous avons enlevé les dessins des personnages et produit une mosaïque de portraits qui est éminemment plus efficace. Le directeur artistique était force de proposition sur le projet. Et son travail ne s’est pas arrêté aux pages du webdoc : il a également conçu des éléments de communication ou d’affichage pour permettre aux journalistes de parler du webdoc.
Il y a un mois, vous évoquiez votre préférence pour la technologie Flash. Avez-vous changé d’avis ?
Non, nous n’avons pas évolué sur la question. Le Flash s’est imposé d’un point de vue financier : c’est plus simple, plus rapide et moins cher que le HTML 5. Cela collait aussi mieux à ce que nous voulions faire, selon le développeur. Même si elle est en plein essor, l’audience sur les tablettes est encore marginale – on l’a vu avec les chiffres de l’application d’Upian pour Alma. Nous n’avons pas jugé bon de fournir des efforts supplémentaires mais je ne suis pas contre si nous trouvions le budget nécessaire.
Quel est votre programme de l’été ?
En ce moment, le développeur travaille sur le webdoc avec des vidéos-prétexte et doit nous livrer une version Beta incessamment sous peu. En parallèle, nous effectuons le montage des vidéos jusqu’à fin août.
Nous réaliserons l’étalonnage et le mixage durant la première semaine de septembre. Puis, la mise en ligne des contenus et les dernières vérifications pendant la deuxième semaine de septembre. Le 16 septembre, No es una crisis sera diffusé en avant-première sur le site de Mediapart, une semaine avant la mise en ligne générale le 23 septembre sur Dailymotion, Courrier International, sur le site d’Usbek et Rica ainsi qu’en Espagne.
Propos recueillis par Nicolas Bole
Voir aussi…
– « No es una crisis » : coulisses d’un web-développement (1/2)
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Ah vraiment très intéressant et un beau développement cette fois-ci pour cet entretien, merci ! J’attends la partie 3 !
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