Alain Guyard est un « philosophe forain » qui mène « un combat pacifique mais pas inoffensif, où s’élabore sans cesse de l’intelligence collective : mettre la philosophie dans tous ses états et la ramener à sa dimension charnelle, dérangeante, dans des lieux inattendus, et au plus près des simples citoyens ». Yohan Laffort en a tiré un film jubilatoire qui sort en salles ce mercredi (voir les projections ici). Présentation.
« La philo, ça ne sert pas à résoudre les problèmes mais à les compliquer. Mon objectif, ce n’est surtout pas de clarifier les choses mais de foutre la merde. J’adore ça ! »
Dès les premiers instants du film, le ton est donné : Alain Guyard , le personnage que l’on va suivre à la trace pendant 1h30 a le verbe haut. Avec sa gouaille et ses grands gestes, il hypnotise son public, le captive et le rend accro… à la philo ! Ni prof, ni gourou, c’est plutôt un passeur. Il parvient par sa passion et son charisme à faire comprendre les pensées de Platon, Aristote, Jankélévitch ou Nietzsche à n’importe qui.
Dans des bistrots, des salles des fêtes, auprès de futurs assistantes sociales ou puéricultrices, d’agriculteurs ou encore dans des prisons ou des hôpitaux psychiatriques : il intervient comme un showman, sans aucune notes, pour éveiller la curiosité, aiguiser le sens critique, bousculer les manières de penser. Et partout où il passe, il fait un tabac.
« Quand je sors, j’ai l’impression d’être intelligent », raconte un participant. « Ça nous sort du confinement dans lequel on a voulu nous mettre » explique une autre. Ou encore « Il réveille nos consciences mais il ne nous dit pas ce qu’il faut faire »
Avec ses gros tatouages sur les mains et sur les avant-bras, son look de rockeur, et ses blagues, Alain Guyard est loin d’une philo des élites, des dîners mondains, de l’entre-soi. La sienne est tout-terrain, au plus proche des gens, dans le concret de leurs vies. Par sa verve et son humour, il la rend abordable mais jamais au rabais, toujours basée sur un socle solide de connaissances. Son but n’est pas d’instruire, mais de donner les outils aux gens pour penser par eux-mêmes.
On n’apprendra pas grand-chose sur la vie passée ou personnelle d’Alain Guyard, si ce n’est qu’il a été prof en lycée. Aujourd’hui, il a choisi de sillonner les routes du sud de la France, comme un « romanichelle de la métaphysique ».
Formellement simple, un peu sage, mais efficace, ce film tient par la force de son personnage, son magnétisme et l’intelligence de ses interventions. Comme le public d’Alain Guyard, on est vite happé par sa fougue et ses tirades enflammées.
Marie Baget