Une belle découverte du Street Art,
dans un écrin web sans surprise…

Un web-documentaire ? C’est quoi ? Un documentaire diffusé sur le web ? Tout passionné de nouvelles écritures documentaires fait souvent face à de telles questions lorsqu’il lâche le terme « web-documentaire » dans une discussion de comptoir. « Mais non ! »,  s’empresse-t-il de répondre, tentant tant bien que mal de définir le genre au moyen des termes un brin jargonants d’« interactivité », de « non-linéarité » ou encore de « participation du spectateur ». Et puis, patatras, voilà que son interlocuteur le prend de court. « Ben alors « Défense d’afficher« , ce truc de Francetv.fr sur le Street-Art, c’est quoi ? » Hum. « Et bien, justement, c’est un documentaire diffusé sur le web ». Hem. A ce point, votre interlocuteur s’est recommandé une bière et parle déjà avec sa voisine.

Reprenons. « Défense d’afficher«  est certainement un documentaire d’une bonne facture classique sur le Street Art. Il se compose d’une série de beaux portraits d’artistes urbains, qui transporte le spectateur de Paris à Bogota, Athènes, Sao Paolo, New York, Turku (Finlande), Singapour et Naïrobi. A chaque escale, un petit film de 5 à 8 minutes, montre les œuvres, les lieux et les gestes de l’artiste, qui décrit sa démarche en voix off.

Il est certainement passionnant de voir Orion parcourir inlassablement les avenues de Sao Paolo en laissant couler un fil de peinture blanche – fragile fil d’Ariane par lequel il semble vouloir préserver sa condition d’homme face à une ville-monstre. Ou de découvrir les créatures tantôt effrayantes, tantôt comiques que Palo, le Finlandais, peint sur les murs de Turku. Ou encore de suivre à la trace les créations de Bleeps, collectif radical qui arpente une Athènes sinistrée par la crise.

Mais pour qui attendrait de cette création web une manière originale de raconter le réel, la déception s’annonce dès l’interface aux graphismes certes réussis, mais pour le moins directifs. Une flèche rouge parcourt rues et friches urbaines, emmenant le spectateur devant une première œuvre. Le spectateur ne pourra pas baguenauder, encore moins explorer. Il lui faudra suivre le guide. Il aura certes le droit de choisir l’ordre des chapitres, et à l’intérieur de chacun d’eux, de consulter une autre vidéo en contre-point, plus informative. Mais pas plus, hein ! Dommage…

 Xavier de la Vega

Les précisions du Blog documentaire

1. Défense d’afficher est un webdocmentaire écrit par Sidonie Garnier, François Le Gall et Jeanne Thibord. Il a été produit par La maison du directeur, Camera Talk productions et France Télévisions.

10 Comments

  1. Hahaha, malheureusement lorsque l’on veut aller plus loin la plèbe s’écrit « c’est trop, trop tôt » et lorsque l’on fait plus abordable les même crient au manque d’ambition !

  2. J’en veux pour preuve, un autre article sur ce même blog au sujet d’une autre tentative de déambulation urbaine :

    http://cinemadocumentaire.wordpress.com/2012/01/02/lactu-du-webdocu-8-360-langstrasse-zurichla-chute-de-lurss/

    J’en cite au hasard quelques extraits qui étayent ma précédente remarque :

    « Le principe est simple, et donne de prime abord l’illusion de toute-puissance… »

    « On se retrouve finalement dans le syndrome du « trop de liberté tue la liberté » : le regard happé au plus offrant, c’est-à-dire au plus distinctif (mais pas forcément le plus intéressant), il ne tirera peut-être qu’une partie de l’intérêt de l’expérience. »

    « Proposer un parcours dont il est possible ponctuellement de s’écarter […] permettrait de pallier cette aplanissement de la perspective… »

    Je serais tenté de dire que… la boucle à 360° est bouclée 🙂

  3. Je suis de cette plèbe qui préfère qu’on ne lui en donne pas trop, qui se noie sous les propositions, qui s’agace quand il y a trop d’informations et qui aime ne pas être sollicitée à chaque minute de la narration pour faire un choix. Parce que j’aime aussi me laisser porter, j’ai aimé ce webdoc.

  4. Xavier de la Vega

    Salut Adrian, bonjour Sese,

    Ce que je discute dans mon post ce n’est pas la qualité de « défense d’afficher ». Comme je l’écris, je l’ai appréciée. Les qualités visuelles de l’interface et des petits films sont incontestables. Les artistes, leurs oeuvres et leur témoignage, sont passionnants.

    J’ai aimé ce travail en tant que spectateur. Or c’est justement la question. « Défense d’afficher » ne me propose pas une autre expérience que celle d’être un spectateur. L’une des potentialités des nouvelles écritures documentaires est justement d’échafauder des expériences différentes du réel, notamment en modifiant la position de l’internaute devant les personnes, les lieux et l’espace qu’ils peuvent décrire. C’est vrai que s’agissant d’un web-doc sur le street art, la possibilité d’explorer et de déambuler, de découvrir des oeuvres à la volée, aurait pu être une piste intéressante.

    Quoi qu’il en soit, inventer de nouvelles expériences du réel est un travail en chantier. Le Blog documentaire tente de défricher et de commenter les pistes qui se dessinent et d’inviter chacun à en discuter. Poursuivons la discussion!

  5. Je ne comprends pas bien ce qui est reproché au juste? L’accessibilité du site et le fait que France TV prenne le risque de co-produire un webdoc abordant sujet intéressant et risqué en terme d’audience? J’ai au contraire trouvé que cette palette de portraits complémentaires nous peignait une jolie vision du street art dans le monde…

  6. Monalisardine

    Pareil que Mo… et dire que l’écrin web est « sans surprise », c’est être vraiment blasé de création web !!!

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