Nouvelle édition du festival de la SCAM qui, chaque année, décerne 30 Étoiles à des films remarqués et remarquables. Séances et rencontres gratuites ces 9 et 10 novembre au Forum des Images à Paris. Avec une soirée de clôture que l’on attend avec impatience, puisqu’elle propose en avant-première le nouveau film d’Arno Bitschy « This Train I Ride ». Présentation.

Histoires intimes

Certains films sont vibrants d’énergie comme La vie extraordinaire de Mimi, filmée pendant 16 ans par Laure Pradal ou En Équilibre d’Antarès Bassis et Pascal Auffray. D’autres donnent la parole à des voix étouffées, blessées, qui au fur et à mesure des images, comme une sorte de catharsis, retrouvent les mots, et avec eux leur place dans la société : Yanie, placé à 14 mois, filmé par Ketty Rios Plama et Magali Bloch dans Itinéraire d’un enfant placé ; les deux héroïnes intersexe de Floriane Devigne dans Ni d’Ève, ni d’Adam, ou les protagonistes de N’en parle pas c’est un secret, film de Fanny Fontan sur l’inceste. Dans Djamilia, Aminatou Echard écoute les femmes kirghizes, et là encore il est question d’intimité, de destinées, de même que dans D’ici là de Matthieu Dibelius, où Koffi fait de sa voiture une bulle de résistance, un endroit humain en face des turbulences extérieures.

En héritage

Il s’agit toujours d’intimité mais plus encore de transmission, lorsqu’un réalisateur vient interroger sa propre histoire familiale. Un fils qui parle à ses parents dans Je ne veux pas être paysan de Tangui le Cras et Anne Paschetta, ou une fille, Emmanuelle Bonmariage, qui raconte l’œuvre de son père Manu, l’homme qui ne voulait pas lâcher sa caméra. Dans Angkar de Neary Adeline Hay, un père, en face de ses anciens bourreaux khmers rouges, retrouve son passé et sa mémoire devant la caméra de sa fille. Avec Âme qui vive, c’est au tour d’une petite-fille, Éliane Raheb, d’interroger son grand-père, fermier chrétien au Liban.

Destins blessés

Les petites histoires rencontrent la Grande ; des destinées sont happées, bouleversées, comme celles des « établis » de 68 dans Étudiants, tous à l’usine ! de Lise Baron et Timo Ebermann, tandis que d’autres sont brutalement interrompues, voire sacrifiées : Les Enfants du 209 rue Saint-Maur de Ruth Zylberman et François Prodromidès. Dans Libye, anatomie d’un crime, la réalisatrice Cécile Allegra rencontre des hommes victimes de viol, devenu arme de guerre.

Décryptages

L’Histoire contemporaine se raconte aussi à travers les systèmes économiques, politiques et sociaux mis en place : En Política de Penda Houzange et Jean-Gabriel Tregoat, Les Hommes du Dictateur de Marjolaine Grappe ou encore Zona Franca de Georgi Lazarevski, où le tourisme de masse, en Terre de feu, vient brutalement percuter une réalité sociale fragile. D’autres enquêtes menées sur plusieurs années démontent les rouages pervertis de nos systèmes bancaires devenus machines à cash, dans BNP Paribas de Xavier Harel et Thomas Lafarge et Inside Lehman Brothers de Jennifer Deschamps.

Portraits singuliers

Des films racontent des vies publiques que l’on croyait connaître avant de les avoir vus : Simone Veil, Albums de famille, un portrait intime, humain et engagé par Hugues Nancy ; le parcours décoiffant de Blaise Cendrars, comme un roman par Jean-Michel Meurice ; et un autre, baroque cette fois-ci, de Jean-Pierre Mocky : la loi de l’Albatros par Charles Schnaebele et Virgile Tyrode. Un autre genre de portrait, celui de la communauté des Samaritains au Proche-Orient qui tente de se réinventer pour survivre : Samaritain de Julien Menanteau. Une ville, un pays, un lieu peuvent aussi devenir personnage central, comme dans les films Norilsk, l’étreinte de glace de François-Xavier Destors, ou celui de Alexander Abaturov et Margaux Opinel, La Russie dans l’objectif, regardée, scrutée par onze de ses photographes contemporains. Avec Zone Rouge, Tristan Thil, fait, en quelque sorte, le portrait de la guerre à travers ces paysages de chaos, terres cicatrices à ciel ouvert de la Première Guerre mondiale, lieu-mémoire, comme Le Pays rémanent de Ugo Zanutto avec ses corons et ses mines désaffectées.

L’art au poing

Qu’il s’agisse de poésie, de création, ces films nous plongent dans les rêves de ceux qui les poursuivent : Marc tout à sa passion des sons dans L’Esprit des lieux de Stéphane Manchematin et Serge Steyer ; ou bien encore Angelo Milano qui, dans Fame, brosse avec Giacomo Abbruzzese l’histoire de son festival d’art contemporain qu’il fera disparaître alors qu’il est à son apogée, parce qu’il n’en trouve plus le sens. Des œuvres engagées, des films à fleur de peau où l’intime rejoint l’universel comme Le Sentier de Hadrien Bertuit, documentaire atypique de six minutes qui mêle photographie et animation. Cette étoile est peut-être la plus singulière de toute, puisque le réalisateur dresse son propre portrait et déroule devant nous son chemin, qui forcément nous ramène au nôtre — entre mémoire, présent et avenir.

Soirée de clôture : This Train I Ride

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