Nous vous en avions parlé dès le dévoilement de la programmation du festival « Visions du Réel »… Le film monumental d’Abbas Fahdel, Homeland (Iraq Year Zero), s’est imposé à Nyon comme le grand vainqueur de la compétition, Sesterce d’or du meilleur long métrage et mention spéciale du Jury Interreligieux. Un documentaire courageux, et salutaire, venu illuminer la 46ème édition de la manifestation…

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« Il s’agit d’une œuvre de référence pour comprendre l’histoire et le présent du Moyen-Orient. Plus qu’un film beau, c’est un film nécessaire. Il devait être réalisé, il doit être vu ».
Telle est l’opinion du directeur de « Visions du Réel », Luciano Barisone, après que le jury de la compétition internationale a accordé le Sesterce d’or à Homeland (Iraq Year Zero), du réalisateur franco-irakien Abbas Fahdel.

Cette fresque de 334 minutes nous emmène en Irak pour nous plonger pendant deux ans dans la vie d’une famille – celle du réalisateur, avant et après l’intervention américaine. Un roman collectif avec « le souffle d’une saga », qui expose « la tragédie et la dignité du peuple irakien dans des moments d’une grande intensité ». Le jury composé de Jean-Stéphane Bron, Nicolas Philibert et Ann Carolin Renninger explique : « Abbas Fahdel dessine le portrait sensible et généreux d’un pays et d’un peuple sur lesquels nous n’avions jusqu’ici qu’une vision simpliste, forgée par 25 ans d’images d’actualités et de propagande. Peu à peu, les clichés s’estompent pour laisser place à des personnages, des hommes, des femmes, des enfants, qui deviennent nos proches. Mêlant le roman familial au roman épique, le quotidien et la guerre, la petite et la grande Histoire, le film nous entraîne de Bagdad aux rives du Tigre, berceau de l’humanité. Un grand film. »

Le jury du Prix Interreligueux (Aida Schläpfer Al Hassani, Mirela Vasadi Blasius, Marc Wehrlin et Daniel Wildmann) ajoute : « Le film pénètre la conscience des spectateurs et nous rapproche des protagonistes de Homeland. Visuellement, nous parvenons à faire partie de leur vie. Le cinéaste a couru de grands risques en faisant ce film et s’est vu également confronté à une tragédie personnelle ».

Avant l’ouverture du festival, Luciano Barisone précisait déjà : « Alors que nous avons visionné 3.700 films au fil de l’année, un documentaire exceptionnel a immédiatement retenu notre attention pour l’édition 2015 il y a quelques mois déjà. Il s’agit d’ailleurs du premier film dont la sélection a été confirmée en vue de sa projection en première mondiale durant le Festival ».

Outre cet événement dont nous reparlerons inévitablement, le festival de Nyon s’enorgueillit cette année d’une affluence record : plus de 35.000 spectateurs – dont 1.100 professionnels accrédités, pour 166 films projetés et 136 réalisateurs invités. Et, comme le souligne Luciano Barisone, « Parmi les 54 pays représentés dans la sélection de Visions du Réel cette année, les cinq continents sont au palmarès, ce qui confirme la vitalité productive du cinéma du réel partout dans le monde ».

Les films primés offrent en effet un joli voyage autour de la planète. La production cinématographique du Moyen-Orient est tout particulièrement à l’honneur, avec bien sûr Homeland (Iraq Year Zero), mais aussi Coma, film libano-syrien de Sara Fattahi, Sesterce d’argent Regard Neuf, ou encore Women in Sink, de Iris Zaki, une coproduction entre Israël et le Royaume-Uni.

L’Amérique du Sud est également représentée avec le Sesterce d’or du meilleur moyen métrage remis à l’argentin The Chechen Family (La Familia Chechena), de Martín Solá, et le Prix Interreligieux pour  Mothers of the Gods (Madres de Los Dioses), de Pablo Agüero.

L’Amérique du Nord est à l’honneur avec deux Prix du Jury pour Of the North, de Dominic Gagnon, et pour le court-métrage Mountain Fire Personnel de Alex Tyson. A ce sujet, le jury composé de John Canciani, Filipa Ramos et Eva Vila, écrit : « Constitué d’images de différentes origines, extraites de films d’actualités comme de publicités institutionnelles et de vidéos amateurs, Mountain Fire Personnel traite de l’accumulation et de la circulation des images animées à l’ère du numérique, tout en tentant de construire un récit à partir de ces éléments fragmentaires. Par cette démarche, le film fait écho à notre manière très contemporaine de manier de multiples sources d’accès à l’image et canaux d’information, et de naviguer parmi eux ».

En plus de divers pays européens, l’Inde et l’Australie sont également au palmarès. De leur côté, les festivaliers ont plébiscité un film de Corée du Sud : My Love Don’t Cross That River, de Moyoung Jin, une très belle histoire d’amour qui remporte le Sesterce d’argent Prix du Public.

La production cinématographique suisse trouve aussi une place de choix dans ce palmarès : au total, 4 films dont 2 coproductions sont primés. Le documentaire Imagine Waking Up Tomorrow And All Music Has Disappeared, de Stefan Schwietert, a ainsi remporté le Sesterce d’argent pour le meilleur film suisse toutes sections confondues. Le jury (Mads Mikkelsen, Daniela Persico et Ulla Simonen) explique : « Le documentaire est une forme de l’art. Et pour un film urgent qui n’a pas seulement une autonomie artistique et la liberté de l’imagination comme thèmes, mais célèbre également l’esprit du punk et du slapstick situationniste en invitant le spectateur à participer dans sa création, le prix est décerné à la proposition de Stefan Schwietert ».

Quant à l’oeuvre de Jean-Gabriel Périot Une jeunesse allemande, déjà récompensée à « Cinéma du Réel », il obtient le Prix du Jury pour le long métrage suisse le plus innovant. « Une grande œuvre basée sur du found footage, qui respecte l’esprit du temps en question, mais qui est en même temps liée à la crise contemporaine de la société capitaliste. Un film qui montre la nécessité d’aller du cinéma à l’action : du cinéma comme produit au cinéma comme engagement dans la société. »

Le Jury du cinéma suisse décerne également une mention spéciale à Horizons (Horizontes) de Eileen Hofer. Et enfin, le Jury des jeunes a décerné une mention spéciale au court métrage suisse Totally Lies de Robin Mognetti, dans la section Premiers Pas.

Prochain rendez-vous à Nyon : du 15 au 23 avril 2016…

3 Comments

  1. N’oublions pas aussi, à ce palmarès, le Prix spécial Regard neuf pour le long métrage de Cyril Leuthy « La nuit s’achève » :
    « Grâce à un remarquable travail de montage et un regard profondément honnête sur l’histoire personnelle et collective de la colonisation, ce film parvient avec brio à tisser différents niveaux de récit et à construire une gamme complexe d’émotions. Le jury décerne le Prix spécial Regard neuf à La nuit s’achève de Cyril Leuthy. »

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