Il est parfois des programmations qui résonnent fortement avec l’actualité… Celle-ci en est une. L’association Documentaire sur grand écran propose, ce lundi 20 février à Paris et en présence du réalisateur Luc Decaster, la projection de « Qui a tué Ali Ziri ? ». Un film qu’il vaut voir, sorti dans les salles françaises il y a déjà plus d’un an, et qui posait alors les questions qui se reformulent aujourd’hui. Tout part de violences policières supposées… Dix places sont à gagner pour les premier-e-s à nous signaler leur intérêt à leblogdocumentaire@gmail.com. Ci-dessous, un extrait de l’analyse de Benjamin Chevallier publiée ici même en octobre 2015.

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De nouveau donc, après On est là (2012) ou Rêve d’usine (2001), Luc Decaster s’attaque au thème de la lutte. De nouveau, dans ce documentaire, il s’en va filmer des situations et des gens qui sont communément l’objet des caméras journalistiques, et donc du formatage médiatique. De nouveau, il réalise une œuvre lumineuse, qui renouvelle la représentation d’un monde qu’il connaît bien pour y vivre depuis des années : celui de la périphérie urbaine, dont Argenteuil est ici fait étendard. Le cinéaste affirme lui-même qu’il « filme le quotidien des oubliés de l’histoire, ceux à qui la presse ne s’intéresse qu’à la suite d’un évènement qui peut faire spectacle, attirer des clients spectateurs ». Incontestablement, le film leur rend un bel hommage.

D’ailleurs, dans cette bataille, Luc Decaster n’hésite pas à prendre place à leurs cotés, à choisir son camp. Et en face, les autorités policières et judiciaires sont dépeintes comme autant d’entités inaccessibles, froides, dont on parle constamment, dont on aperçoit parfois les bâtiments et les voitures, mais qu’on ne rencontre jamais (l’unique scène du film faisant exister des policiers en service insiste sur leur inflexibilité machinale).

Qui a tué Ali Ziri ? s’apparente donc au film d’un cinéaste-citoyen, à propos d’une mobilisation citoyenne. A quelques exceptions près, le montage fait se succéder des séquences qui se déroulent sur l’espace public, et qui relèvent de l’action militante collective. On y voit ainsi des Argenteuillais (et des Argenteuillaises) tracter, manifester, assister aux réunions du collectif de lutte, se déplacer au tribunal et, surtout, donner de la voix. C’est du reste là que réside la force la plus évidente de ce documentaire, tant il est rare d’entendre cette parole ainsi restituée. De débats en discours se dévoilent en effet l’éloquence et l’érudition politique de citoyens dont ce n’est pourtant pas le métier (ils sont professeurs, retraités, responsables associatifs, etc.).

Une esthétique engagée, à hauteur d’homme

Luc Decaster parvient à mettre en place une mise en scène qui préserve et transmet cette parole. Avec, au cœur de son système, une durée de plan toute singulière qui laisse du temps à l’élocution pour se développer, pour évoluer, pour parfois achopper, pour parfois arriver à son terme, pour parfois passer d’interlocuteur en interlocuteur. Le cinéaste multiplie ainsi les panoramiques à l’épaule pour suivre les échanges, et il ne découpe les séquences qu’avec une grande modération.

Et si parfois il s’autorise un gros plan ou un contre-champ, ce n’est jamais pour compresser la situation dont il rend compte. Aussi, lorsqu’au cours d’un meeting de quartier se suivent à la tribune quatre personnes, toutes souhaitant exprimer leur sentiment sur l’affaire Ali Ziri, Luc Decaster n’en élimine aucune : il les filme toutes puis, au montage, restitue leurs interventions dans leur intégralité. La séquence, qui s’étend alors sur une dizaine de minutes et comporte de nombreux moments d’hésitation de la part des orateurs, est captivante de bout en bout.

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flyer RVDD 20 fevrier 2017 (2p)

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